La salle de bal

La salle de bal / Anna Hope (trad de l'anglais Elodie Leplat) - Gallimard, 2017 - 388 p. ; 22€ (bibli)

Dans un asile d'aliénés en Angleterre (Yorkshire) en 1910. Il y a beaucoup de malheureux, de déshérités. Ils n'ont pas à se plaindre car l'asile (plus de 1000 "malades") vit en autarcie, les hommes et ces femmens travaillent dans les champs et dans les services, ils sont "bien nourris" alors que ce sont quand même des "rebuts" de la société. Leurs conditions de "détention" et les méthodes coercitives forment un "système" bien rodé.

Il y a tout une galerie de personnages rassemblés ici pour le pire en général. Et il y a Ella, jeune femme arrivée là pour avoir "pété un cable" dans l'usine de textile dans laquelle elle bosse pour 3 fois rien depuis l'âge de 8 ans.

Il y a John, l'irlandais mélancolique, son copain qui ne se laisse pas abattre, le surveillant sadique, le directeur caractériel, Clara, une jeune femme "hystérique" er le médecin chef, Charles, le raté de sa famille, pétri de bonnes intentions apparentes. Pour adoucir les comportements de ces "êtres" faibles d'eprit et/ou pauvres (car à l'époque, c'est pareil), il a formé un petit orchestre, afin de leur apporter un peu de musique, il pense que ça peut les améliorer. Chaque vendredi soir, il y a d'ailleurs un bal organisé (pour y assister, les participants sont "choisis" en fonction de leur comportement). C'est le seul moment où hommes et femmes se retrouvent dans une même pièce (vaste salle superbe !) pour danser au son de l'orchestre du docteur. Mais suite à un encaînement d'évènements, le docteur se rend vite compte que ces "gens" sont vraiment mauvais et pervertis et il se trouve finalement attiré par les théories d'eugénisme qui ont le vent en poupe*.

Une histoire d'amour sert de tolie de fond à ma description de cet univers carcéral très bien décrit.

Attention, c'est addict ! Superbe histoire, quand on commence, on ne peut plus s'arrêter ! L'écriture est fluide, l'histoire nous étreint.

L'auteur s'est servie de sa propre histoire familiale (son arrière arrière grand-père a été interné au West Riding Pauper Lunatic Asylum) et de documents d'archives pour retracer l'histoire de ce lieu improbable qui a vraiment existé !

*À cette époque, un certain Winston Churchill, ministre de l’intérieur s’intéressait à la meilleure manière de protéger la «race» britannique des risques de dégénérescence que faisaient peser sur elle la lie de la société. Il se montrait sensible aux solutions proposées par la Société d’Eugénisme attachée à l’enfermement des « déficients mentaux » et à leur stérilisation. Ce jeune politicien (il avait trente cinq ans) fut l’un des rédacteurs de la Loi sur la Déficience Mentale (Mental Deficiency Law) de 1913.

https://www.proj3ctm4yh3m.com/urbex/2015/10/13/urbex-high-royds-insane-asylum-aka-high-royds-hospital-aka-west-riding-pauper-lunatic-asylum-menston-leeds-west-yorkshire-february-2015/

Comments

[Anne]

Beau livre sur un sujet original et méconnu : les asiles d'aliénés au début du XX ème en Angleterre; très bien écrit, fiction avec documentation sous-jacente fouillée ; on est happé par l'histoire .