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bouquine-bouquin
12 février 2023

Auschwitz et après. tome 1 Aucun de nous ne reviendra

Aucun de nous ne reviendra / Charlotte Delbo - Les éditions de minuit, 2013 - 180 p. ; 9.65€     (bibli)

aucundenousnereviendra"Puisque j’ai eu le privilège d’être témoin de ce paroxysme de l’histoire, d’y participer, la chance d’en revenir et la capacité d’écrire, eh bien il n’y avait plus qu’à écrire."

Charlotte Delbo est une de 230 femmes qui, dans le Convoi du 24 janvier, partirent en 1943 de Compiègne pour Auschwitz.

"Ces femmes ont marqué l'histoire de Birkenau : elles entrent en chantant la Marseillaise La force de leur solidarité depuis le Fort de Romainville permet à 49 femmes d'entre elles de rentrer."

Malgré l'impossibilité de survivre, elle en est revenue... et elle nous offre ici un témoignage hors du commun, d'une intensité rare, poignant. Elle nous fait vraiment ressentir l'horreur de ces camps. Le corps est très présent, la douleur, la soif, l'amitié, mais aussi la peur, la violence, la mort.

C'est un témoignage bouleversant, unique, charnel, que l'on ne peut pas oublier.

"Aucun de nous ne reviendra" est un vers d'Apollinaire qui a hanté Charlotte Delbo pendant toute sa captivité. Les survivantes devaient témoigner, elles se l'étaient juré.

Ce livre m'a marqué terriblement. A lire ! à faire lire !

J'avais découvert Charlotte Delbo en lisant le bouquin de Foenkinos, ouis récemment celui de Valentine Goby (notice du 30/01/23) m'a donné envie de la lire directement. Elle a mis 20 ans avant de publier.

"Quelquefois, une qui exprimait la pensée commune interrompait d’un : « Mais comment vous représentez-vous la sortie ? » Nous reprenions conscience. La question tombait dans le silence."

"C’est à cette gare qu’ils arrivent, qu’ils viennent de n’importe où.
Ils y arrivent après des jours et après des nuits
ayant traversé des pays entiers
ils y arrivent avec les enfants même les petits qui ne devraient pas être du voyage.
Ils ont emporté les enfants parce qu’on ne se sépare pas des enfants pour ce voyage-là.
Ceux qui en avaient ont emporté de l’or parce qu’ils croyaient que l’or pouvait être utile.
Tous ont emporté ce qu’ils avaient de plus cher parce qu’il ne faut pas laisser ce qui est cher quand on part au loin.
Tous ont emporté leur vie, c’était surtout sa vie qu’il fallait prendre avec soi.
Et quand ils arrivent
ils croient qu’ils sont arrivés en enfer
possible. Pourtant ils n’y croyaient pas.
Ils ignoraient qu’on prît le train pour l’enfer mais puisqu’ils y sont ils s’arment et se sentent prêts à l’affronter
avec les enfants les femmes les vieux parents
avec les souvenirs de famille et les papiers de famille.
Ils ne savent pas qu’à cette gare-là on n’arrive pas.
Ils attendent le pire – ils n’attendent pas l’inconcevable.
Et quand on leur crie de se ranger par cinq, hommes d’un côté, femmes et enfants de l’autre, dans une langue qu’ils ne comprennent pas, ils comprennent aux coups de bâton et se rangent par cinq puisqu’ils s’attendent à tout.
Les mères gardent les enfants contre elles – elles tremblaient qu’ils leur fussent enlevés – parce que les enfants ont faim et soif et sont chiffonnés de l’insomnie à travers tant de pays. Enfin on arrive, elles vont pouvoir s’occuper d’eux.
Et quand on leur crie de laisser les paquets, les édredons et les souvenirs sur le quai, ils les laissent parce qu’ils doivent s’attendre à tout et ne veulent s’étonner de rien. Ils disent « on verra bien », ils ont déjà tant vu et ils sont fatigués du voyage.
La gare n’est pas une gare. C’est la fin d’un rail. Ils regardent et ils sont éprouvés par la désolation autour d’eux.
Le matin la brume leur cache les marais."
Le soir les réflecteurs éclairent les barbelés blancs dans une netteté de photographie astrale. Ils croient que c’est là qu’on les mène et ils sont effrayés".

"Charlotte Delboest née en 1913 à Vigneux-sur-Seine. Elle épouse dans les années 1930 Georges Dudach, militant communiste. Elle est engagée par Louis Jouvet comme secrétaire. Elle est passionnée par le théâtre, la philosophie, l'écriture. Pendant la guerre, elle et son mari appartiennent au groupe de résistants de Maï et Georges Politzer, Hélène et Jacques Solomon. Ils seront arrêtés. Les hommes seront fusillés, les femmes, avec 227 autres, seront envoyées -seul convoi de politiques dans ce cas- à Auschwitz le 24 janvier 1943." Elle est morte en 1985 !! et je ne connaissais pas son existence !!

 

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