Le voleur d'innocence

Le voleur d'innocence / René Frégni - Folio, 1996 -262 p.            (prêté par Nadine,merci !)

René-Jean raconte son enfance à Marseille. Les difficultés qu'il rencontre au sein de sa famille et à l'école, la pauvreté, la cruauté des enfants, le sentiment d'injustice contre les riches, les nantis, ceux qui ont le pouvoir... L'écriture est pleine de gouaille et chantante, les phrases sont des rivières douces ou des coups de poing, on passe du rire aux larmes et on se révolte avec l'enfant. On aurait pu appeler ce livre "naissance d'un mauvais garçon", ça fait penser "aux Quatre cent coups" d'ailleurs, car il a effectivement "mal tourné" à l'adolescence et il a failli "mal finir"... heureusement, sa sensibilité, la nature, la poései, l'humour  et l'amour qu'il portait à sa mère lui ont ouvert un autre chemin.

p. 73 : "C'est si long l'enfance ! C'est comme plusieurs vies mises bout à bout qui vont se perdre là-bas au bord de la mémoire, quelques lampes qui vacillent dans la nuit au coin d'une impasse. Del'enfance on n'en voit jamais le bout, quand on y arrive, c'est trop tard. Reste le lourd fredon de la mélancolie."

"Futé et vicieux était ce Raymond-là. Quand il ne déchirait pas les ailes des mouches afin qu'elles tournent en rond, il se tripotait le quiqui sous le bureau. Son jeu préféré consistait à se le tirer le plus fort possible comme un élastique et à le lâcher brusquement avec un bruit de langue : « Chhhlac ! » Il faisait ça toute la journée. Il me disait : « C'est pour l'allonger, j'en veux une très très longue pour faire peur à ma sœur ! »
Un drôle de coco décidément ; il m'intriguait de plus en plus. Il prit la manie de tremper sa quiquette dans l'encrier «  pour faire encore plus peur à ma sœur ». Longue et bleue il la voulait ! Alors le bruit courut dans la classe et tout le monde le surnomma « Quiquette bleue ».