Le répondeur

24 mars 2023

Le répondeur / Luc Blanvillain - Quidam éditeur . Les nomades, 2022 - 283 p. ; 9€ (prêté par Anne, merci !)

Baptiste est très doué pour imiter les voix. Il se produit d'ailleurs dans un petit théâtre associatif qui vivote. Un soir, le fameux écrivain, Pierre Chozène lui fait une étrange proposition : comme il écrit un roman et qu'il en a marre d'être dérangé par tous les appels sur son téléphone mobile, il demande à Baptiste de se faire passer pour lui et de répondre à sa place. Il lui donne un carnet dans lequel il a inscrit qui était qui et les rapports qu'il entretient avec chacun.e, afin que Baptiste puisse s'y repérer. Et voilà une étrange vie (un peu schizophrène) qui commence pour le jeune homme car il doit donc, avec virtuosité, répondre à la place de Chozène à tout un tas de personnes, des relations diverses, son éditeur, son ex-femme, son traducteur, et même sa fille ! Chozène est ravi, Baptiste se marre, jusqu'à ce que tout dérape...

Récit drôle, intelligent et original ! Une écriture enlevée et dynamique. Ce roman, comme une satire de notre époque, parle aussi des difficultés réelles à communiquer, des relations amoureuses et familiales et tacle au passage un certain milieu parisien littéraire. Quelques mots rares font plaisir.

Je l'ai lu d'une traite et avec plaisir ! Et j'ai pu bavarder un peu avec l'auteur présent ce week-end aux Escales de Binic ! Courez-y !!

A lire !!

"Luc Blanvillain vit et travaille. Il s'en réjouit chaque jour." (c'est ce qui est écrit en en-tête, j'adore !)

"Baptiste avait souvent envisagé cette question de la célébrité. À certains égards, il lui fallait même reconnaître qu'il l'avait désirée. Mais il n'avait jamais fait l'effort de se la représenter, de s'en figurer les implications. Né à la fin du XXème siècle, il avait intégré l'idée qu'elle constituait un état sans contour net ni causes précises. Il y avait eu une époque, déjà terriblement lointaine, son enfance ou celle de ses parents, au cours de laquelle elle était perçue comme la récompense publique d'un mérite, d'un talent«Il n'en revenait pas. Un producteur, il aurait pu comprendre. Mais un écrivain? Peut-être l'un de ceux qu'il admirait le plus, un auteur aussi célèbre que discret, Goncourt à la toute fin du vingtième siècle, prosateur raffiné dont la voix douce et rare illuminait certaines fins d'après-midi d'automne, sur France Culture. Par quelle fantaisie du destin Pierre Chozène avait-il pu se retrouver dans sa loge? C'était inim. Il y avait eu des scientifiques célèbres, des écrivains célèbres puis des acteurs, des chanteurs, des mannequins célèbres.
Ensuite, progressivement, étaient apparues les célébrités.
En inversant les causalités, la renommée s'était quintessenciée. On n'était plus célèbre parce qu'on avait tourné dans un film. On devenait acteur parce qu'on était célèbre."